La réouverture de Notre-Dame de Paris, un événement historique

La fondation de Notre-Dame

L’affection que les Français portent à Notre-Dame est liée à sa riche histoire débutant à l’époque romaine. Lutèce s’était développée sur les pentes de la butte Sainte-Geneviève, tenant l’île de la Cité à l’écart. Le site facilitait cependant le passage de la Seine. À la fin du III^e siècle, l’île devint le centre urbain de Lutèce, protégée des incursions barbares par le fleuve et un rempart. Le christianisme se développa en Gaule au IV^e siècle. Le culte se déroulait à cette époque chez des particuliers, mais le nombre croissant de fidèles nécessita la construction d’un lieu apte à accueillir une large assemblée à Lutèce. Une église et un baptistère sont alors bâtis vers 350-360 à l’est de l’île.

La cathédrale mérovingienne et carolingienne

L’église primitive est reconstruite ou rénovée sur ordre du roi des Francs Childebert I^er (511-558). Devenue cathédrale autour du VI^e siècle, elle prit le vocable de Notre-Dame au siècle suivant. Son état est mieux connu à l’époque carolingienne. Le sanctuaire est reconstruit grâce à une donation impériale dans la première moitié du IX^e siècle, selon un plan basilical avec une nef centrale et deux collatéraux. Un quartier clos baptisé « cloître » est aménagé au nord de l’édifice pour héberger des chanoines qui assistaient l’évêque lors des offices religieux. Le chapitre cathédral  (ou collège de prêtres) reçut des rois carolingiens de larges privilèges seigneuriaux et sera l’un des initiateurs des transformations ultérieures.

De la cathédrale romane à la cathédrale gothique

Au XI^e siècle, la Notre-Dame carolingienne est dans un état délabré. Une nouvelle église de style roman est alors bâtie sur l’ancienne. Il subsiste peu de traces archéologiques de cet édifice, si ce n’est une abside semi-circulaire retrouvée en 1848 sous le chœur de la cathédrale gothique. Des décors et sculptures ont cependant été réemployés pour la Notre-Dame que nous connaissons.

Au milieu du XII^e siècle quatre églises de quatre styles différents s’étaient succédé depuis l’époque romaine. L’art dit gothique ou ogival en raison de la forme de ses voûtes est alors naissant. Après la consécration du chœur gothique de la basilique Saint-Denis en 1144, les évêques de la région reprirent ce nouveau style architectural pour la reconstruction de leurs cathédrales, manifestant ainsi leur pouvoir. C’est le cas à Noyon dès 1145 ou à Laon en 1155. Ces exemples, conjugués à une augmentation sensible de la population de la capitale, ont sans doute motivé Maurice de Sully, évêque de Paris de 1160 à 1196, à bâtir un édifice totalement nouveau.

Un chantier de 80 ans

La construction débuta en 1160, mais la date traditionnelle de la fondation de la nouvelle cathédrale est fixée au printemps 1163, lorsque le pape Alexandre III (1159-1183) de passage à Paris posa symboliquement la première pierre. Le chantier utilisa essentiellement des matériaux locaux : la pierre calcaire et le bois. Quant au plomb, très utilisé, son origine n’a pas été identifiée. En 1177, le chœur est achevé et le maître-autel est consacré le 19 mai 1182 par un légat du pape. Les bâtiments à l’ouest du chantier sont détruits pour laisser place à la nef. À la fin du siècle, les parties basses des travées sont terminées. En 1208, le massif occidental avec ses tours est bien avancé et la nef et le chœur sont couverts.

Si le gros œuvre est achevé vers 1220, des modifications sont effectuées immédiatement sur les fenêtres pour faire passer plus de lumière. La charpente et la couverture sont également revues pour faciliter l’écoulement des eaux de pluie. En 1250, l’édifice est complété avec les deux tours à l’ouest et la flèche au-dessus de la croisée du transept. Il a fallu plus de 80 ans pour bâtir une nouvelle cathédrale, mais quelle cathédrale ! Elle est la première église gothique à élever une nef à plus de
30 mètres de hauteur.

Notre-Dame commença à servir de nécropole dans les années 1180. Cette vocation funéraire conduisit à l’édification de chapelles latérales entre les arcs-boutants pour abriter les tombes des défunts vers 1225.

Aménagements, restaurations, destructions

Depuis le XIV^e siècle, Notre-Dame a fait l’objet d’aménagements qui ont modifié son état initial. La Renaissance et l’âge baroque, temps admiratifs de l’architecture gréco-romaine, se sont désintéressés de cette cathédrale de style gothique et donc considérée comme barbare. À la fin du XVII^e siècle, le jubé médiéval richement sculpté séparant le chœur de la nef est remplacé par une grille en fer forgé doré. Un nouveau maître-autel du sculpteur français Nicolas Coustou est installé, encadré des statues de Louis XIII et de Louis XIV.

Le XVIII^e siècle est celui de changements plus notables encore. En 1726, le cardinal-archevêque de Paris fit restaurer la grande voûte du transept, la charpente et la couverture de l’église qui en avaient besoin. Son successeur remplaça en 1741 le pavage polychrome intérieur par des dalles de marbre blanc et noir. En 1756, les vitraux médiévaux du haut- chœur sont remplacés par des vitres blanches afin de laisser passer la lumière, et les murs sont badigeonnés de blanc faisant disparaître le décor peint. Le portail central est revu en 1756 par l’architecte Jacques-Germain Soufflot pour supprimer le trumeau de la porte principale qui empêchait les processions de passer avec un dais. La flèche, fragilisée par les intempéries, est démontée en 1792.

Notre-Dame n’échappa pas au vandalisme révolutionnaire : les statues du portail occidental sont mutilées, décapitées ou enlevées par les sans-culottes. Robespierre en fit un temps le temple de la Raison, puis après sa chute, l’église fut transformée en entrepôt de vin. Le culte est rétabli en 1795 malgré les dommages subis. C’est dans une cathédrale vétuste que Napoléon se couronna empereur en 1804. L’état lamentable de Notre-Dame n’était pas sans charme pour les romantiques du XIX^e siècle, puisqu’il inspira Victor Hugo pour son chef-d’œuvre Notre-Dame de Paris publié en 1821. Le succès du roman sensibilisa l’opinion à l’inestimable valeur du monument et le sauva de la destruction. En 1845, le ministre des Cultes de la monarchie de Juillet chargea Eugène Viollet-le-Duc et Jean-Baptiste-Antoine Lassus de le restaurer. Leur
action porta surtout sur l’extérieur avec une nouvelle flèche élevée en 1859, plus imposante que la médiévale, et la rénovation des sculptures.

Notre-Dame passa sans dommages la première moitié du XX^e siècle et ses deux conflits mondiaux. En 1965, les vitraux ternes de la nef installées au XVIII^e siècle furent remplacés par ceux du peintre-verrier Jacques Le Chevallier, reproduisant les teintes médiévales. Enfin, dans les années 1990, l’extérieur de la cathédrale fut décapé et retrouva la teinte claire de la pierre calcaire parisienne.

L’incendie du 15 avril 2019

Dans la soirée du 15 avril 2019, un incendie détruisit la charpente et la toiture de la cathédrale et endommagea les voûtes de la croisée du transept, du transept nord et une travée de la nef. La flèche culminant à 96 mètres de haut s’effondra sous les yeux horrifiés des Parisiens et des touristes. Le sinistre fut maîtrisé le lendemain par les sapeurs-pompiers de Paris. Des dons affluèrent du monde entier : 850 millions d’euros furent récoltés pour la rebâtir. Le chantier fut lancé peu après et mobilisa durant cinq ans 250 entreprises et des centaines d’artisans. Sous les échafaudages, Notre-Dame retrouva peu à peu son éclat. Une nouvelle flèche fut montée durant l’hiver 2024 et la nouvelle charpente de la nef fut achevée au printemps suivant. L’intérieur a aussi été rénové et les archéologues y exhumèrent des traces de son brillant passé : des fragments du jubé médiéval furent découverts dans le chœur et le cercueil du poète Joachim du Bellay (1522-1560) y a même très certainement été déterré !

Un lieu patrimonial français et mondial

Depuis sa fondation, Notre-Dame est liée à l’histoire de France. Parmi les événements qui s’y sont déroulés, citons la tenue des premiers États généraux du royaume en 1302 réunis par le roi Philippe le Bel, ou encore le mariage hautement politique entre Henri de Navarre et Marguerite de Valois en 1572.

Le montant faramineux collecté pour la restauration de la cathédrale témoigne de l’attachement des Français et de sa popularité à travers le monde. Les écrivains et les artistes comme Hugo, Nerval, Aragon, David, Matisse et Chagall, n’ont cessé d’être fascinés par Notre-Dame et ont contribué à sa renommée universelle. Avant son incendie, elle était le monument le plus visité de la capitale. Elle le sera encore après l’inauguration du 7 décembre 2024 par Emmanuel Macron, puisque 15 millions de touristes et pèlerins sont attendus en 2025 !

La Monnaie de Paris célèbre la réouverture de Notre-Dame

À l’occasion de ce grand événement, la Monnaie de Paris lance une série de monnaies commémoratives millésimées exceptionnelles dans sa collection « Excellence à la française ». Elles reprennent un dessin commun mettant en valeur la restauration de la cathédrale. À l’avers, la façade de Notre-Dame est représentée dans une baie en ogive surmontée d’une rosace. Au revers, la charpente restaurée avec une vue de l’intérieur de la nef rénovée et son nouveau mobilier.

La plus prestigieuse monnaie de cette collection est une pièce de forme ogivale d’une valeur faciale de 5 000 euros or BE, pesant un kilogramme et tirée à 24 exemplaires seulement. À l’avers, la rosace est un insert en or émaillé rendant hommage à la lumière des vitraux du monument. Deux monnaies de forme identiques de 10 euros argent BE et 200 euros or BE, frappées à 5 000 et 200 exemplaires, sont aussi proposées. Des monnaies de collection plus classiques, mais toujours en tirage limité – 10 euros et 50 euros or BE, ainsi que 25 et 50 euros argent BE – complètent la collection en honorant les corps de métier ayant œuvré à la restauration de Notre-Dame avec une variante du dessin des pièces de forme.